Roland Garros4 septembre 1911 : Roland Garros bat le record d’altitude, en atteignant 3 910 mètres au-dessus de Saint-Malo, après un décollage de Dinar, aux commandes de son Blériot XI allégé, équipé d’un moteur Omega de 50 ch.

Le moteur Omega est un moteur en étoile conçu par la société Gnome qui deviendra Gnome & Rhône en 1915, sera nationalisée sous le nom de SNECMA en 1945 puis deviendra Safran en 2005 après la fusion avec Sagem.

En savoir plus sur ce moteur (G. Hartmann et archives SNECMA)

Voir aussi SNECMA, naissance d’un géant du même auteur

Début 1913 Roland Garros fait, à Molsheim, la connaissance du prestigieux constructeur d’automobiles Ettore Bugatti.
Les deux hommes se sont très vite entendus.
Garros a tout de suite commandé une Bugatti 5 litres type 18, la seule voiture pouvant moralement porter le nom de « Roland-Garros » puisque c’est Bugatti lui-même qui l’a ainsi baptisée (il n’en sera fabriqué que sept exemplaires, celle de Garros, numéro de châssis 474, survit en Grande-Bretagne sous le nom de « Black Bess »).
Elle lui sera livrée le 18 septembre 1913.

Et le 23 septembre 1913, Roland Garros passait à la postérité après avoir réussi la première traversée aérienne de la Méditerranée en 7 heures et 53 minutes

Le 5 octobre 1918, à l’issue d’un combat contre des Fokker D.VII, son SPAD explosait en l’air avant de s’écraser sur le territoire de la commune de Saint-Morel, dans les Ardennes, non loin de Vouziers où il est enterré.

Bugatti Black Bess type 18

Après la mort de Roland Garros, cette Bugatti carrossée par le célèbre Labourdette, a été vendue par sa famille à Louis Coatalen, un français, ingénieur chez Sunbeam en Angleterre.
Après être passée ensuite entre les mains de plusieurs collectionneurs anglais dont la femme pilote Ivy Cummings (c’est alors que le nom de Black Bess lui a été donné), elle a été revendue aux enchère Rétromobile en février 2009 à un collectionneur européen pour 2,47 millions d’euros.
Bien entretenue, elle est restée dans un état semblable à celui dans lequel elle a été livrée à Roland Garros en 1913.

En savoir plus sur l’histoire de cette Bugatti

En savoir plus sur Roland Garros


La requête de Jean-Pierre Lefèvre-Garros, biographe de Roland Garros avant les enchères Rétromobile de février 2009.

Le 7 février 2009, au salon Rétromobile de la porte de Versailles, la maison Bonhams met la « Black Bess » aux enchères, pour 1.300.000€.

La “Black Bess”?  Il s’agit en fait d’une des sept Bugatti 5 litres “type 18” fabriquées à Molsheim en 1913, et celle-ci, dont le châssis porte le n° 474, est celle-là même qui a été livrée à Roland Garros le 18 septembre 1913, cinq jours avant son entrée dans l’histoire par la première traversée aérienne de la Méditerranée, reliant l’Europe à l’Afrique de Fréjus à Bizerte.
Il l’avait faite carrosser par le célèbre Labourdette et l’a longtemps utilisée après ce vol transméditerranéen, lors des nombreuses épreuves aéronautiques auxquelles il participait, que ce soit le rallye de Monaco qu’il a remporté en avril 1914, le 3ème meeting de Vienne, la course Paris-Londres, ou lors de sa visite des usines allemandes en compagnie de son ami allemand Hellmuth Hirth, puis à l’escadrille MS23, à celle du Camp Retranché de Paris ou à la MS26 devenue à la fin de la guerre la célèbre SPA26, dont l’insigne, la Cigogne aux ailes allongées à la Saint-Galmier, également dite de Garros, survit encore dans l’Armée de l’Air..
Pendant ses trois longues années de captivité en Allemagne, il l’avait confiée aux soins de son grand ami Edmond Audemars, avant de la retrouver après son époustouflante et spectaculaire évasion de l’Oflag de Magdeburg en février 1918.
Après sa mort glorieuse à Saint-Morel, le 5 octobre de la même année, la famille a préféré se séparer de cette voiture, mais si le premier propriétaire, Louis Coatalen, était bien français, les sept autres étaient tous anglais pure souche, si bien que nos amis d’outre Manche ont longtemps pu croire que cette voiture était tout simplement britannique.
Or le nom de “Black Bess” (il s’agit de celui du cheval du célèbre bandit de grand chemin Dick Turpin) lui a été donné par l’une de ses nombreux propriétaires, un peu par hasard semble-t-il. Alors que c’est Ettore Bugatti lui-même qui a baptisé son type-18 “type Roland-Garros”. C’est donc la seule voiture pouvant, moralement sinon légalement, porter le nom de “Roland-Garros”.
L’amitié entre Roland Garros, ce citoyen du monde avant l’heure, initiateur entre autres de l’aviation militaire brésilienne, l’inventeur aussi de l’avion de chasse monoplace, ce rugbyman portant fièrement les couleurs du Stade Français, et Ettore Bugatti, génial concepteur et constructeur d’automobiles que son ami considérait comme “l’artiste incomparable qui seul sait donner une âme à de l’acier”, cette amitié était d’une qualité rare.
Ainsi, début 1915, lorsque, avant l’entrée en guerre de l’Italie encore puissance neutre, Ettore qui avait fui Molsheim pour chercher refuge en France s’était trouvé avec sa famille dans une situation financière désastreuse, son ami Roland lui avait fait parvenir une lettre de crédit lui cédant toute sa fortune, prétextant que lui étant célibataire et susceptible de disparaître au front un jour ou l’autre, il n’en avait que faire… Ettore se garda bien de toucher à cette aide si généreusement offerte, mais il n’a pas manqué de baptiser son fils cadet, né après la guerre et la mort de Garros, du prénom de “Roland”.
C’est dire le poids affectif de cette voiture qui constitue assurément un élément important du patrimoine français. Il serait en effet regrettable que cette belle vieille dame ne retrouve pas ses origines, après son si long séjour hors de chez elle.
Pourquoi donc, dans le cadre d’une dation, ne pas espérer la création d’un syndicat français réunissant les plus importants amoureux des vieilles automobiles respectueux du devoir de mémoire, qu’ils appartiennent au monde de la finance (et ils sont nombreux), à celui de l’art et du spectacle, à l’univers du sport (la Fédération des Internationaux du Sport Français a élu Roland Garros “Gloire du Sport 1995”), les Réunionnais soucieux de la renommée de leur petit pays, que tous ces gens permettent à la “Roland-Garros” de retrouver le pays de sa jeunesse.
Déjà en 2008, un « groupe de travail/Roland Garros-HEC/SUPAERO » (avec l’aide d’adhérents du Stade Français) réunissant quelques nouveaux condisciples HEC de Garros (lui-même de la promotion 1908) ont saisi l’occasion du centenaire de sa sortie de l’Ecole pour célébrer sa mémoire par de nombreuses manifestations, colloque au Musée de l’Air et de l’Espace du Bourget (qui en a décidé de donner son nom au grand auditorium), match de rugby sur le campus de Jouy-en-Josas entre une équipe de HEC et une équipe du Stade Français, à la Ferté-Allais où furent présentés une Demoiselle (sur laquelle il a obtenu son Brevet n°147), un Blériot comme celui de ses premiers records d’altitude et un Morane H, copie de celui de la traversée de la Méditerranée, à la Mairie du XVIème où fut rappelé que l’évadé de 1918 était le co-fondateur de l’Union Nationale des Evadés de Guerre…
En outre, et toujours en 2008, la Base aérienne 181 “Lieutenant Roland Garros” à Sainte-Marie de La Réunion a inauguré, lors d’une “semaine aéronautique” largement suivie par les enfants des écoles, une statue de son parrain réalisée en pierre du pays par le sculpteur Marco Ah Kiem, et le collège Roland-Garros de Nice a commémoré son souvenir tout au long d’une semaine d’expositions et de manifestations.
Alors, on peut rêver : 2013 sera le centenaire de la première traversée aérienne de la Méditerranée. Comment la France célèbrera-t-elle cet événement qui marque une étape importante de l’histoire de l’aviation, et de l’histoire tout court ?

Jean-Pierre LEFEVRE-GARROS
biographe de Roland Garros, janvier 2009.

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